Article tiré de la recherche-brique Santé, “Focus sur” duite de la ffgolf par Anne Champomier
Focus sur la pathologie par le Docteur Olivier Rouillon, médecin fédéral :
Les blessures lombaires sont la première cause de blessures chez les hommes. Une étude australienne menée par Andrew J. McHardy sur 1000 joueurs amateurs suivis sur une année montre que la lombalgie représente 20% des blessures. Mais c’est aussi, chez les pros hommes, la première cause d’arrêt de carrière. L’exemple le plus connu est celui de Tiger Woods, qui souffrait en plus d’une radiculalgie (une sciatique) et qui a été opéré à quatre reprises. Lors de la dernière, il a subi une arthrodèse, où l’on a fait fusionner la 5e lombaire et le sacrum. L’Américain a perdu un peu en rotation mais désormais il joue sans douleur et retrouve progressivement un meilleur niveau.
Le golf n’est pas le facteur qui déclenche les pathologies lombaires ou qui entraîne une modification anatomique, mais il révèle certaines choses. Au fur et à mesure de l’âge, il y a une usure quasi mécanique qui varie selon l’activité professionnelle et sportive.
Plusieurs causes peuvent aggraver les douleurs lombaires : une posture inadéquate, une technique inadaptée avec une extension exagérée du rachis lombaire lors du swing et un matériel inadapté avec des clubs trop lourds ou trop raides.
Contrairement à ce que l’on pensait auparavant, il faut rester actifs, en cas de lombalgies, hormis lors de la période de douleurs aiguës où le patient est traité de façon médicamenteuse. On commence d’abord par la rééducation puis par la reprise sportive.
Trois facteurs sont importants pour la prévention primaire ou la prévention de récidive :
– La force musculaire
– La mobilité que l’on peut appeler la souplesse
– La proprioception, c’est-à-dire l’équilibre et le sens de position dans l’espace
À vous de jouer : Pour prévenir les blessures
Chez le joueur de plus de 40 ans, il y a quelques précautions à prendre :
– Une bonne préparation physique avec un renforcement des muscles antérieur et postérieur de la cuisse (quadriceps et ischio-jambier) permet de travailler l’équilibre de la région lombaire que ce soit en position assise et surtout en position debout. Il est donc important de mettre au point avec son kiné un petit programme d’entraînement à faire chez soi 3-4 fois par semaine de 10-15 minutes qui consiste en un mélange de renforcement musculaire, de gainage, d’étirements et de proprioception.
– Un échauffement sans club d’une petite dizaine de minutes permet de minimiser le risque de blessures. La séance de practice est plus efficace et on joue mieux.
– Le matériel de golf a fait des progrès fantastiques ces dernières années, mais les équipementiers estiment que seulement 20% à 25% des gens jouent avec un matériel adapté. Ne pas négliger les séances de fitting, jouer avec des grips, des manches et des têtes de clubs adaptés à son niveau de jeu, son âge, sa taille etc.
– L’aspect technique. Il faut aussi avoir un swing adapté à sa condition physique, sa souplesse, et sa force. Un swing plus simple préserve les articulations. Passé un certain âge, Il faut oublier le grand finish, complet, cambré au niveau des lombaires, mais adopter un swing plus compact avec moins d’amplitude, et en tournant plus globalement.
– Au practice, il ne faut pas taper en cadence mais maximum 3 balles à la minute.
– Au putting ne pas rester dans une position figée, penché en avant à putter 15 balles de suite. Le mieux c’est de putter 2 balles, se relever, changer de trou, de manière à bouger.
L’œil du kiné Philippe Vignon, kiné de l’équipe de France Girls
Les lombalgies sont différentes selon les patients. Les problèmes qu’on retrouve chez le golfeur sont la raideur au niveau du rachis lombaire ou de la colonne dans son ensemble ou encore dans les mouvements du bassin, qui doivent être souples et rapides. On constate aussi souvent des problèmes de hanche, dû à un manque de rotation interne qui donne des contraintes énormes au rachis lombaire.
Chez les jeunes ou le professionnel, le crunch factor et la position du golfeur quand il finit son swing très cambré avec un mouvement latéral, réalisés à outrance, créent des contraintes au niveau du dos. Il ne faut pas forcément interdire ces mouvements, mais il faut les réaliser dans de bonnes conditions, d‘où l’intérêt de la préparation physique.
Les muscles fessiers et les muscles des cuisses (quadriceps) sont aussi importants, s’il n’y a pas assez de muscles, il y a des problèmes d’assises, d’appuis qui créent des tensions au niveau du dos.
Passée la phase antalgique, le travail de rééducation implique l’utilisation d’une panoplie d’appareils : la radiofréquence, l’utilisation de la chaleur, les massages ou encore le taping.
Il faut travailler le gainage dynamique avec des exercices de gainage cumulés avec certains mouvements surtout pour la sangle abdominale. Pour protéger le dos, il faut renforcer les muscles obliques et le muscle transverse.
On travaille par exemple avec des ballons ou des élastiques le mouvement et la proprioception, pour que le patient ait un contrôle de son corps, que son corps puisse subir des mouvements et se protéger. Ensuite on s’oriente vers un réentraînement à l’effort, en rapprochant les exercices du swing de golf, en travaillant sur les transferts d’appui, et progressivement intensifier l’effort pour qu’il n’y ait pas d’appréhension lors de la reprise.
Il est aussi important d’apprendre à bien s’échauffer, à ne pas passer directement de sa voiture au départ d’un 18 trous sans un minimum de précautions.
Mais il faut aussi faire attention lors de certains mouvements quand on porte son sac, ou quand on se penche pour ramasser sa balle, ou pour regarder sa ligne de putt.
Et pourquoi pas la biomécanique ?
(Par Philippe Rouch, directeur de l’Institut de Biomécanique Humaine Georges-Charpak, Ecole Nationale Supérieure des Arts et Métiers)
La biomécanique étudie les mécanismes complexes du corps qui aboutissent à un mouvement déterminé. Pour résumer, le système neuromusculosquelettique du corps humain lui permet de marcher, de courir, de sauter etc. Appliquée au sport, la biomécanique va permettre de comprendre cette machine qu’est le corps humain pour mieux appréhender son fonctionnement et, à terme, optimiser les performances et minimiser les risques de blessures.
A l’institut de biomécanique humaine Georges Charpak, nous menons depuis cinq ans une étude sur les golfeurs en partenariat avec la Fédération Française de Golf et le Dr Olivier Rouillon. Nous effectuons une analyse complète du sportif, qu’il soit amateur ou professionnelle, de son anatomie, et de son geste, grâce à une modélisation personnalisée en 3D, pour que l’athlète, son coach, ou son préparateur physique comprennent leur base de travail.
Même si nous ne sommes pas des entraîneurs, nous pouvons apporter un soutien scientifique et des éléments de réponse, dire si le swing est efficace ou pas, rechercher quelle devrait être la position du golfeur ou son geste pour optimiser sa performance ou réduire les douleurs. Pour le dos, par exemple, nous pouvons analyser quelle serait la position idéale du bassin pour mettre le rachis dans la position optimale au regard de l’anatomie 3D du golfeur et de son geste. La modélisation 3D personnalisée offre des possibilités très intéressantes pour comprendre et analyser le fonctionnement de la biomécanique du swing.