21/06/2012 – En direct du British Amateur, 18-23 juin
En charge de la fameuse équipe de handball de Montpellier depuis 1990, ce thérapeute veille sur les meilleurs golfeurs amateurs français depuis un an et demi.
On pourrait croire qu’un kiné travaille exclusivement dans une salle de soins. Certains le font certainement, mais pas Alain Carmand. En plus des massages et des soins éventuels qu’il apporte aux joueurs, il arpente les parcours de golf. Il profite des beaux coups tapés par ses patients, jouit éventuellement des beautés du paysage, mais s’attache surtout à observer la gestuelle des joueurs.
« Il faut essayer de comprendre la posture de forme des athlètes, c’est à dire comment se positionne leur corps quand ils vont bien, explique-t-il. Cela ne veut pas dire qu’ils doivent forcément se tenir tout droit. Certains sportifs paraissent tout tordus mais leur position de torsion est celle dans laquelle ils sont le plus équilibrés. Par rapport à cela, il faut essayer de déterminer les carences de chacun. »
Le golf, avec ses joueurs de gabarits très différents, illustre parfaitement ce point de vue. « Il y a des physiques qui a priori ne sont pas fait pour des activités physiques mais qui compensent par une grande technicité. Il n’y a pas de morphotype figé. Certains sont petits, gros ou maigres, d’autres grands, maigres ou gros, et chacun va adapter son jeu à sa morphologie et à ses qualités naturelles. »
C’est pourquoi la démarche d’Alain Carmand consiste, avant de réfléchir aux spécificités d’un sport, à savoir comment un corps doit fonctionner pour faire une activité sportive quelle qu’elle soit. Ce n’est qu’ensuite que l’on doit se pencher sur les zones du corps les plus sollicitées. « Chez le golfeur, les axes de rotation, les chevilles, les genoux, les hanches et le bassin, sont essentiels pour que le geste soit le plus harmonieux possible, le moins contraignant et le moins usant », détaille-t-il.
La notion de corps parfait est donc à bannir absolument. Pour Amain Carmand, tous les sportifs sont hors normes, autant physiquement que mentalement. Son but n’est donc pas de modifier un corps mais de l’aider à assurer avec aisance des mouvements déterminés.
« Pour effectuer un geste technique donné, le corps doit recourir à des compensations. Si celles-ci équilibrent bien le geste en question, il pourra être répété cent fois avant que n’apparaissent la fatigue, l’usure, puis une mauvaise qualité technique. Dans le cas contraire, la limite de répétition sera limitée. »
L’une des priorités du kiné de l’équipe de France est la nécessité de travailler en commun avec les entraineurs qui se trouvent confrontés à des limitations techniques de leurs joueurs dont l’origine peut être physique. « Ce qui est très intéressant avec Renaud Gris, c’est qu’on ne sectorise pas les compétences. Les kinés doivent comprendre les questions que se posent les entraîneurs ou celles des joueurs qui se plaignent de telle ou telle partie de leur corps. Les réponses sont souvent d’ordre biomécanique et entraînent soit des soins, soit un changement de direction de travail pour l’entraîneur et son joueur. »
L’autre axe de travail fondamental d’Alain Carmand, qui est également ostéopathe, est la prévention. A partir du moment où l’on constate que le sport de haut niveau est traumatisant pour le corps, le but est d’aider les sportifs à s’user le moins possible. « Notre travail consiste à les aider à se connaître le mieux possible. C’est pourquoi nous leur donnons des clefs pour le réveil musculaire, les étirements, la récupération qu’ils doivent pouvoir assurer eux-mêmes. Cela s’étend également au domaine diététique. D’une façon générale, il s’agit de leur permettre de reconnaître leurs faiblesses, de tous ordres, et de leur apprendre à se soigner avant d’être malade. »
Dans le cadre d’une épreuve telle que le British amateurs, au cours de laquelle les joueurs peuvent avoir à jouer dix parcours en sept jours, ces mesures semblent pour le moins nécessaires. Mais la carrière sportive des membres de l’équipe de France ne s’arrêtera pas là. « L’idéal est de disposer d’un maximum de spécialistes pendant une période mais pour rapidement ne plus en avoir du tout. L’autonomie des golfeurs est fondamentale. Dans leur vie sportive à venir, ils ne doivent pas être dépendants d’un spécialiste ou d’un gourou, de quelque sorte qu’ils soient. »
Jean-Louis Aragon